Ebooks//974 vous présente : Le Graal de la Liberté épisode 2
Est-ce le Roman-Poétique de Paul Clodel Cochard, ne conviendrait-il pas de révolutionner le genre littéraire romanesque ? Soit, en revenant à un contenu qui interpelle, le genre de l’Odyssée ou de l’Enéide?
Après tout, voilà un livre dans lequel il raconte de façon fictive, les Mémoires d’un esclave poète, Zangiba, tout en vers réguliers, en structure du texte en alexandrin (12 syllabes) et en son fameux « hexadécasyllabe » (16 syllabes) et textes versifiés. Paul Clodel respecte le rythme, la coupe et bien-sur la rime. De ce fait il donne à la poésie une lecture suivie, comme à celle du roman au déroulement de son histoire d’aventure. De même la Philosophie poétique est à sa comble dans cette Édition inédites intitulée : L’Ode au roman-poétique.
L’équipe A.P.C. (Ass.Paul Clodel) Textes protégés ©
La terre destinée
Près de l’eau, couleur du ciel clair, nous ramions vers cette terre. Le soleil ne nous était pair à l’envie d’être sur terre. Je ramais dans ses vagues de cette mer au goût salé. Et qui d’entrain aux divagues, lourde, une voie de pis-aller. De bravoures nous arrivions par le poids des chaînes entassées. Nos pauvres pieds moribonds mouillés par la digue enlacée. A cette terre inconnue, ayant cette peur d’arriver. Le marin frappa ma peau nue, à savoir où, me fit râler.
Nous nous déplacions enchaînés les uns aux autres, par troupe. Les femmes furent désenchaînées marchant d’allure du groupe. La vue éblouissante, quand mes pieds, touchaient le sable chaud. Ce soleil, lueur éclatante m’empêchait de voir plus haut. Cette terre me fait peur. De vertes allures célestes nous acclamaient de nos ardeurs. Comme l’animal en leste. Devant nous, attendions de nous surprendre la cohue des blancs. Être un monde moins tendre en nous prétendions à l’élan.
A l’effet d’être animal
Nous débarquions dans un monde inconnu, un monde d’homme blanc. Nous toisait en faisant ronde autour de nous, faisant semblant nous voir à l’effet d’être animal, du pieds à la tête. Nos marches, dûment épuisés par ce mal, sonnaient l’entête. Que nous retenaient nos chaînes, à l’envi d’un retour par mer.
Nous fouettant dans nos marches des coups laissaient le goût amer. Nous conduisant à l’avant des gens, à l’effort d’une marche. Dans un monde de patriarche, nous nous mettions en avant ; pour la simple raison, être faible, devant un peuple différent.
Nos corps vendus, ô infâme !
Nos corps vendus, ô infâme à ma colère de brandir ! Devant nous ces hommes et femmes qui nous toisaient à gaudir. Tous octroyaient une heurte à qui crierait le plus fort, serait celui qui s’aheurtait aux sentiments dus à l’effort. Nous devions par la suite, suivre hommes et femmes laiteux. Ils nous ont choisis, survivre à l’idée croire aux adieux.
Je ne vous tairai jamais, pour ceux qui sont liés à l’Afrique, n’exclue pas l’amour que j’en ai pour lui. Peur d’abandonnique, et si les hommes blancs, n’étiez jamais venu à Zanzibar ; l’ Afrique aurait conservé sa liberté, est-ce trop tard ? Meut par lente enchaînement, mon corps vendu par un maître ! Aux animaux qui n’en dément, à la charrue qui s’apprête !Escortés par ceux du bateau, nous délogions cette masse. A l’éloignement des bedeaux nous traînions ainsi sur place.
Île Bourbon en 1845
― Je n’oublierai jamais ce vol et qui même aujourd’hui retraçant mes mémoires d’esclave, m’a affecté l’esprit. Charles, mon sol et ses instants heureux, en parlant, je rêve d’un désir de prendre son temps et se coucher sur la grève Afrique. Ô tu me manques ! Ne plus être près des miens, abreuve l’espoir qui s’efflanque. Dois-je espérer les miens ?
"Ô chère vision, toi qui répands encore,
De la plage lointaine où tu dors à jamais,
Comme un mélancolique et doux reflet d'aurore
Au fond d'un cœur obscur et glacé désormais!"
Charles Leconte de Lisle ( L’Illusion suprême)
Quand un homme parvient à ses mémoires, il se retourne vers son passé. Il le complète par ses dernières visions. Ceux qui hantaient sa jeunesse, il traînera. Il séjourne l’esprit aux errances et aux meilleurs souvenirs d’illusion.
L’Illusion suprême
Quand l’homme approche enfin des sommets où la vie
Va plonger dans votre ombre inerte, ô mornes cieux !
Debout sur la hauteur aveuglément gravie,
Les premiers jours vécus éblouissent ses yeux.
Tandis que la nuit monte et déborde les grèves,
Il revoit, au delà de l’horizon lointain,
Tourbillonner le vol des désirs et des rêves
Dans la rose clarté de son heureux matin.
Monde lugubre, où nul ne voudrait redescendre
Par le même chemin solitaire, âpre et lent,
Vous, stériles soleils, qui n’êtes plus que cendre,
Et vous, ô pleurs muets, tombés d’un cœur sanglant !
Celui qui va goûter le sommeil sans aurore
Dont l’homme ni le Dieu n’ont pu rompre le sceau,
Chair qui va disparaître, âme qui s’évapore,
S’emplit des visions qui hantaient son berceau.
Rien du passé perdu qui soudain ne renaisse :
La montagne natale et les vieux tamarins,
Les chers morts qui l’aimaient au temps de sa jeunesse
Et qui dorment là-bas dans les sables marins.
Sous les lilas géants où vibrent les abeilles,
Voici le vert coteau, la tranquille maison,
Les grappes de Letchis et les mangues vermeilles
Et l’oiseau bleu dans le maïs en floraison ;
Aux pentes des Pitons, parmi les cannes grêles
Dont la peau d’ambre mûr s’ouvre au jus attiédi,
Le vol vif et strident des roses sauterelles
Qui s’enivrent de la lumière de midi ;
Les cascades, en un brouillard de pierreries,
Versant du haut des rocs leur neige en éventail ;
Et la brise embaumée autour des sucreries,
Et le fourmillement des Hindous au travail ;
Le café rouge, par monceaux, sur l’aire sèche ;
Dans les mortiers massifs le son des calaous ;
Les grands-parents assis sous la varangue fraîche
Et les rires d’enfants à l’ombre des bambous ;
Le ciel vaste où le mont dentelé se profile,
Lorsque ta pourpre, ô soir, le revêt tout entier !
Et le chant triste et doux des Bandes à la file
Qui s’en viennent des hauts et s’en vont au quartier.
Voici les bassins clairs entre les blocs de lave ;
Par les sentiers de la savane, vers l’enclos,
Le beuglement des bœufs bossus de Tamatave
Mêlé dans l’air sonore au murmure des flots,
Et sur la côte, au pied des dunes de Saint-Gilles,
Le long de son corail merveilleux et changeant,
Comme un essaim d’oiseaux les pirogues agiles
Trempant leur aile aiguë aux écumes d’argent.
Puis, tout s’apaise et dort. La lune se balance,
Perle éclatante, au fond des cieux d’astres emplis ;
La mer soupire et semble accroître le silence
Et berce le reflet des mondes dans ses plis.
Mille arômes légers émanent des feuillages
Où la mouche d’or rôde, étincelle et bruit ;
Et les feux des chasseurs, sur les mornes sauvages,
Jaillissent dans le bleu splendide de la nuit.
Et tu renais aussi, fantôme diaphane,
Qui fis battre son cœur pour la première fois,
Et, fleur cueillie avant que le soleil te fane,
Ne parfumas qu’un jour l’ombre calme des bois !
Ô chère Vision, toi qui répands encore,
De la plage lointaine où tu dors à jamais,
Comme un mélancolique et doux reflet d’aurore
Au fond d’un cœur obscur et glacé désormais !
Les ans n’ont pas pesé sur ta grâce immortelle,
La tombe bienheureuse a sauvé ta beauté :
Il te revoit, avec tes yeux divins, et telle
Que tu lui souriais en un monde enchanté !
Mais quand il s’en ira dans le muet mystère
Où tout ce qui vécut demeure enseveli,
Qui saura que ton âme a fleuri sur la terre,
Ô doux rêve, promis à l’infaillible oubli ?
Et vous, joyeux soleils des naïves années,
Vous, éclatantes nuits de l’infini béant,
Qui versiez votre gloire aux mers illuminées,
L’esprit qui vous songea vous entraîne au néant.
Ah ! tout cela, jeunesse, amour, joie et pensée,
Chants de la mer et des forêts, souffles du ciel
Emportant à plein vol l’Espérance insensée,
Qu’est-ce que tout cela, qui n’est pas éternel ?
Soit ! la poussière humaine, en proie au temps rapide,
Ses voluptés, ses pleurs, ses combats, ses remords,
Les Dieux qu’elle a conçus et l’univers stupide
Ne valent pas la paix impassible des morts ".
Leconte de Lisle ( L’Illusion suprême)
4.
Bourbon 1845
Nous montions les raides pentes attelant à deux forts mulets. Aux dos ses forces portantes à nous tirer comme boulets. Pour rompre le doux silence, celui qui tenait les cordes en avant de la diligence nous destinait l’escorte. Se tenant à l’avant de charrette un noir nous soutenait. Il n’était dans la traite mais au blanc il lui appartenait. Murmurant un son africain qui fut l’écoute du maître. Le laissant à son air faquin aux murmures chansonnettes. Ses paroles touchantes, familières, sont nos dialectes.
"Ô, île au lointaine des mers profondes,
Et perdu dans ses flots d’eaux bleutées d’océan.
Seuls les bateaux peuvent s’approcher en fonde.
Un détroit aux côtes volcaniques d’argent,
Elle abrite les montagnes et les plages.
En unissant tous les plantes d’un goût normal,
Sa faune et sa flore restent sauvage.
Elle accueille tout espèce à l'animal.
Ses habitants viennent de toutes les races.
Cette Île Bourbon est le fruit d’un dessein
Qui sera reconnu pour sa multi-race
D’esclaves de tous genres, de tous desseins.
La mer nous déposait sur grève brûlante
Et nous avions senti les filaos siffler.
Se courbant d’une salutation galante,
A l’humble intention, d’inconnu camouflé."
Ils nous laissaient passer. Retenant ses ombres, les filaos nous accueillaient au sol lointain. Nous montions une pente raide et sombre, nous obligeant alors de marcher par besoin.
― Regardez, disait-il, les maîtres ont construit un monde en dur. La route se promène aux sillons leurs chevaux et leur charrette de bruit. Telle beauté de vue et tout en grimpette. De plus en plus nous pouvions voir toutes cités. C'est "Sin-Pol" et la ville se tenait dans nos mains ! Cocotiers, filaos sont l'emblème cité. Pour nous c'est coupe cannes à sucre, demain ! Ces vallées vertes s’étendent à l'horizon. Un soleil aux rayons de feu vous embrase à l'herbe sèche. Il brûle peaux sans raison !
Laissez nous guider en haut, l'esprit en rase...
Aux abîmes d'un monde de fers et de chaînages
Nous voilà maintenant devant un village, on nous conduisait paisiblement attelés. Nous voyions nos frères au loin dans ce sillage, nous acclamant bras ouverts et démantelés. Les mots ne sortaient pas et je restais sage. Je regardais les miens comme un sentiment ailé. Je ne me retrouvais plus dans ce paysage. J’admettais mon dessein, mais je suis démantelé.
Nous suivions aux fouets, nos membres aux chaînages, entrant d'un monde que l'homme est écartelé. Nos peaux sombres dans le noir, faisaient feuillages à coté de ceux qui nous ont encastelés. Nous marchions et suivions ces blancs hommes et mages nous laissaient s’entourer de nos siens épelés. Aux abîmes d'un monde de fers, chaînages, Nous tombions donc aux sols comme un bosselé.
L'ombre à la nuit me retenait son prisonnier
Ce monde est fait de nos siens, il m’acclame, me soigne par d'eau si fraîche, sans me dénier. La soif désireuse, riche qu'on proclame... Soudain, j’entendis une voix tel un souffle d'être mon auteur ! Dii, pensai-je par diction :
― Chez toi, ton pays l'Afrique, qui s’essouffle. Écoutes ton frère t’adresser par sa dicton, vers ici, il fait parti de la grimpette. Il t'a chanté l'amour des mots, en émotions.
― Je compte savoir quel est ce monde bête ? lui répondais-je, je vis un frère en action. Il se présenta, étant Job, des cuisines ! Était-ce de lui les beaux mots de l’ascension ?
― Céans, ton nom c'est "Zangiba" me fit signes…
Job prit d'une main un instrument musical. Il nous chantait tout en langue africaine, jouant sur une corde d’un d'objet bancal. Il disait, l’objet, est sa seule amante. Puis il nous martelait quelques mots incompris. Quelques mots des gens d'ici, ceux des blancs d'homme. Des mots venant de chez nous sonnaient le mépris pour l’espèce habitant sur ce sol d’hommes. En chant, Job me décrivait son vécu d’ici :
― Sur ce sol, ils sont peu gentils les peaux claires. Ils nous font travailler durement sans merci. Demain vous saurez le courage est paire. Heureux mes frères noirs, ce soir vous m'écouter ! Mais demain, commence le sang de nos peines. Écoute mon doux cœur cette nuit, demain sera coupé devant-eux pour les servir, écoute là mes veines…
Il pleure des sons mon bobre !
Dans les chansonnettes d'autrui
Il pleure des sons mon bobre¹ !
Ô ! il donne un son au bruit
Cet instrument qu’est le bobre ?
J’en sors un son sur son nylon :
Fil liant la calebasse,
A ma main un bâton, ni long,
Ni court donnant la basse.
Bobre l’ami de mes chansons,
Ô combien,sur toi, je pleure !
Tu es mon seul compagnon.
Qui fait vibrer ma demeure.
Combien de chants partisans
Peut-il en jouer ce bobre ?
Mélodie d’un chant puissant,
Il pleure sous le fouet mon bobre.
Musicien de bobre (Paul Clodel C.)
¹ Bob ou bobre est un instrument de musique d'origine africaine principalement utilisé à La Réunion dans le maloya. Il s'agit d'un arc musical, cousin du berimbau .. ( construit en calebasse, fil cuivre ou nylon et d'un arc de bois et baguette ).
Quelle est donc cette ode musicale ?
Job délaissait son objet que pour nous nourrir. Un riz jauni, du grain se noyait d'eau sale. J’étais trop épuisé et je mangeais le riz. Pourtant Job m'avait servi en amicale. Dans la situation je trouvais un ami. L’Afrique je pleurais, mon cœur, tout en larme. Rien ne semblait la remplacer ce pays, ni le froid de cette nuit tombée, des flammes. Ni le repas qui même chaud offre regret. Peut-être que ces sons aux odes musicales. Job, me fait souvenir mon rocher où j'ai gré ; mais restaient mes miens aux recherches locales. Une fois, la terre m'accueillait bras ouverts. Le jour chaud aux vents doux de ce long voyage, me fit dormir au profond silence d’un sol vert. Rêves magiques s'invitaient mes sages.
Je me réveillais à la lueur du soleil
Ô, je pleurais toutes mes larmes de mon corps.
Sur mes joues salées naquit la pluie de fleuve.
Aux reflets d'une vie perdue au loin, dehors.
Ô, combien était-ce possible d’être meuve ?
Ce rêve m'emportait près des miens africains :
Ma mère prie mon retour, âme chagrine.
Je me voyais chez moi où j'y crois à chacun.
Être en Afrique, l'âme pérégrine.
Mon père fait une fête à mon retour.
Mon hameau m'accueillait tel un dieu lumière.
Je dansais et puis je voyais Job tout autour !
La nuit tombait sur la flamme en prière.
Je me réveillais à la lueur du soleil,
Mes pauvres pieds étaient cordés à la poutre.
Un de ma race me détachait au réveil.
Ils nous enchaînaient aux chevilles si lourdes.
5.
Mon sieur est notre nouveau maître
Nos corps affaiblis du voyage, nous avions de la peine à nous mettre debout. Se relevant, nos membres enchaînés, nous suivions Job sans émettre une parole car pleines d'idées sombres venaient à moi et me poussaient à déchaîner. Des hommes de blancs vêtus se dressaient devant nous. Un homme de couleur claire, d’un visage froid et aux yeux bleus du ciel, nous fit aussitôt baisser nos têtes vers nos pieds binômes.Il dicta vite à Job quelque chose de très officiel. Ne comprenant pas, à l’époque, le sens de son langage et de même nôtre raison d'y être fait tous prisonniers. Ni de nôtre but sur cette terre, quel était le gage ? Une envie de prendre fuite me traversa l’esprit sied. Puis Job nous disait :
― "Mon Sieur" de Villèle est notre maître.
Ce jour, dis-moi mon Dieu, quel est le pourquoi de cette raison ? Sommes-nous vraiment, sur terre, une race à sous-maître ? L’homme blanc n’est-il un maître qui n’a point de déraison ? Je veux bien qu’il n’a pas de compassion afin de soumettre son désir égoïste d’obtenir les gens comme animal. Mais l’homme n’est-il pas lui un animal déraisonnable ? Il est insensé et même de voir comment il fait du mal ?
Tout cela dans l’espoir d’obtenir un fait dit raisonnable ! Est-ce le fait de raisonner ainsi, peut faire mal autrui ? Il m’a semblait que le blanc vivant ici se croyait Maître ! De même qu’il soit plus haut que le créateur, et il le dit : « Tous esclaves m’obéit puisque je suis leurs seul Maître » ; mais tous les esclaves vous méprisent, Mon Sieur, sans pour autant car certains, comme Job, essayaient d’obtenir vos caresses. Mais d’autre esclaves, comme moi, préféraient d’être méfiant. Le Maître choisie son égo qu’aux détresses. En vérité je ne suis le maître de ma fatalité. De même si je pouvais choisir d’être toujours libre comme j’étais en Afrique mais quelle est ma fatalité ? Dans le silence de soi se meurt l’espoir fait d’équilibre. L’homme est un maître pour lui même et n’a point de raison ?
Si l’homme avait une juste raison d’intelligence et de cœur il n’aurait pas choisi d’être le maître ! Osons croire que l’homme n’a qu’un manque à donner d’indulgence ! Tout individu peut réfléchir de ses faits, c’est la raison. Écouter son égoïsme c’est choisir le pouvoir de faire des faits déraisonnables au service d’un rythme.
Je me souviens que Job m’avait dit une phrase, celle-ci : « La raison du bonheur se récolte par fruit du bien être. Je lui répondais : « est-ce que le bonheur de l’homme blanchi de ses fautes par ses siens s’est ça le bonheur du bien être ? Pour moi, lui-disais-je : « Le bonheur est la joie de liberté, sans liberté on ne peut être heureux. Me contredire c’est d’obéir l’ordre de ces hommes qui ont l’autorité d’un maître du monde sur nous, ceux-là, qui sont à maudire...
Par la suite Mon Sieur parlait avec Job dans une langue qu’au début je ne comprenais pas évidemment tout le sens. Job, même étant un africain, est devenu un bilingue. Comme il s’exprimait si bien dans cette langue d’aucun sens. Devant eux, nous étions debout, nous les observâmes vite ne comprenant toujours point la raison. L’homme était parti puis nous marchions ensemble enchaînés. La perfide fuite, me prit mais nos pieds étaient noués par la chaîne, tel mépris. Ce jour là, Mon Sieur était accompagné d'un autre homme. Ce dernier montait sur un cheval qui faisait un pas trottant. J’ai vu une arme à feu sur le dos de ce blanc homme. Dans sa main, il tenait un fouet l’appliquant à bout portant.
Il nous poussa à nous presser le pas lent de notre marche. Il nous fallait marcher vite de peur de recevoir le fouet. Cependant nous étions liés aux pieds, troublant nos démarches, nos bras au ciel nous protégeaient en vain de ses coups de fouets. A l’allure cadencée et sous le fouet, nous arrivions, après la longue marche, dans un champ de canne à sucre. Je me souviens d’être lié à un esclave par un chaînon à nos pieds. Ils nous ordonnaient couper les roseaux de lucre¹ avec une arme tranchante qu’il nous mettaient dans nos mains. Près d’eux, Job, nous expliquait la raison de notre bienvenue. Nous avions l’obligation de couper ces cannes de nos mains. Il nous disait comment faire ; c’est la raison de notre venue. Job nous avertissait, de ne pas fuir, de crainte, d'être tuer par "Mon Sieur le Commandeur² " l'homme à cheval rouge.
Après avoir expliquer Job s'en allait, nous voici mués ; Mon Sieur nous y avait réveillé au fouet qui bouge…De sa main blanche, il frappait nos dos sanglants et nous devions tous ensemble suivre ses ordres : c’est de couper la canne. Venait alors la soif et la faim, nous mangions la canne et buvions jusqu’au bout sa juteuse mare sous un soleil de profane.
¹Profit, argent, considéré en lui-même et recherché avec avidité
²Monsieur le Commandeur
De fuir sur le vif mes taches qui sont sans cœur
Le commandeur nous montrait, d'une main, à couper la canne. De l'autre main, la jeter par terre pour en faire un tas. Le soleil n’était guère se montrer façon courtisane. Par sa lueur brumeuse, il se souciait point de nos états. Nous étions attachés aux chevilles par le lien des chaînes. Un de nous se mit à parler et l'autre recevait le fouet. Nous ne pouvions point fuir d’ici puisque tout se fait en chaînes. Je jalousais mes jours heureux d’Afrique sans être rouer. Soudain une peur persista en moi, je craignis sentence. Ô, dans ces champs, commençait où finissait notre liberté ! Dans ce pays étranger venait naître ma pénitence. Pour survivre nous devions, aux champs, oublier la liberté. Boire l'eau me manquait et puis mes mains saignaient de cette vie. De cette outrance de fatigue j’étais tout en sueur. Je pleurais sur ma souffrance et ma pensée avait envie de fuir, sur le vif de ses servitudes, aux hommes sans cœur.
Il m'ordonna, à genou, de lui pardonner
Le soleil, tardivement, se couchait à avilir chaleur. De nos corps épuisés auxquels furent rouer aux fouettes et par chance nous résistions tous aux ordres du commandeur. Job était venu, récupérant couteaux, en chansonnette. D’un air triste, je regardais Mon Sieur dans ses yeux si hauts. Le commandeur prit son arme à feu avec regard ferme. Job s’affolant courut très vite pour retenir mon couteau, me parla et j’eus remis l’arme au cavalier à terme. De mon geste, Sieur Commandeur me fouetta à tomber. Puis mes poignets se furent attachés, me levant très vite, il m'ordonna, devant les autres esclaves, lui pardonner.
Cette journée nous n'avions pas manger. L'estomac avide, fatigué, nous retournions et pareillement les autres jours. Nos pieds liés, nous marchions difficilement en descente. Mes membres et mon corps semblaient avoir des douleurs pour toujours. Le soir, nous devions construire aux cases les plus ressentes.
Ma case en paille
Vivre dedans la case en paille construite par la main
D’esclave malgache qui travaille la paille maïs fin.
Où autre vétiver, roseau, telle que la canne sèche.
Ma pauvre case se tenant aux poteaux et qui dessèche.
Elle peut se jouter aux fortes pluies pourtant s’en allant aux vents.
C’est la cause inouïe du va vite préalablement,
Par une nécessité d’habitation, il faut l’ultime
Nécessaire pour vivre l’intime dans cette abîme.
Autrement elle vivrait par poussière si l’on ne bat son sol.
Il n’y a guère d’eau qu’on acquière au source ras du sol.
Il faut passer un balai sec sur un dur parquet marronne.
Sur sa terre battue au blanc-bec, je frottais dur en bonne.
Ma case tout en paille vêtue me protégeait du soleil.
Je voyais la tribu de marmaille qui grandissaient. Éveil
Chaque matinées pour aller couper les grands champs de cannes.
Attendre chaque soirs, autour d’un lit de camp, voir le calme.
Ma case de paille si misère prônait la pauvreté !
Je fus l’habitant qui l’ère sans moyen de la décréter.
Construire au soir, vite, au mieux à la dite mesure
Ma case, ô quel miséricordieux fit de sa parure !
Je voyais les rats dansaient dans la paille, couleuvres aussi.
Puis quand vint la pluie sur mes oreilles par le torchis qui fuit.
Je rêvais d’un cabanon solide qu’il fallait construire !
Au choix qu’il fallait prendre par raisons du mieux, pour déduire
Ma case en paille misère prône une pauvreté
Je suis son seul habitant qui l’ère et sans but décrété.
Je demande qu’à construire en mieux ma dite mesure
Miséricordieux Maître vous vivez votre case dure !
6.
Est-ce du maloya ?
Le soir venu nous tombâmes d'épuisement. Nos corps si lourds nous évitaient d'autres peines. Nous mangions nos maigres repas avidement. De corps abattus, nous ne trouvions de haine. Job nous emportait avec son Bobre chez nous. Je revoyais ma capture dans la crique. Je voyais ma famille me cherchant partout. Ils devaient penser que je suis en Afrique. Job chantait, un son me rappelant Maloya, cet hameau où commençait mon aventure.J’écoutais son air, n’était-ce point du maloya ? Un son de tam-tam, quel sonorité pure ? On se laissait emporter par rythmes du chant. Je me laissais fredonner comme la prière. Mon esprit poétique s'emparait du chant. Je joignais en prêtant ma voix sans lumière. Job me proposa de la chanter en créole. Il reprenait mon poème, et traduisait les paroles africaines en créole. En solitaire, dans sa tête, il chantonnait. Job demanda aux autres de faire des rythmes musicaux avec le tambour, et pour pouvoir les accompagner de son bobre en rime. Les femmes faisaient que répéter dans le noir.
Maloya de couleurs
Tu laisses ton "roulèr" pour prendre ton bobre.
Le son transmet à tes mains le bruit de ton cœur,
Qui vibre un air de musique couleur sobre !
Maloya , ma lo ya, ma lo ya de couleur
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de la nuit
Si tu choisis le rouge pour montrer ta colère,
Peins tes nuits blanches du colorant vert espoir.
Le noir sur ta peau d’esclave, te rend sévère,
Aux champs de canne jaune Tamarin ou Mapou noir,
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de couleur
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de la nuit
Là ou ailleurs ta musique est ta prière,
Qui un jour libérera les bleus de ton corps !
Tes gestes retiennent la douleur de misère.
Où la nuit d’un bleu outremer tu t’endors.
Que le feu près de toi brûle d’un vif rouge,
Soit pareil, à la couleur du sang africain.
Que l’une de tes danseuses porte ce rouge,
Fait vibrer le rythme bamboula à ton corps fin.
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de couleur
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de la nuit
Au fond un vert espoir de ton maloya reste
Qui se voisine au jaune de lune dans la nuit !
Et se fond aussi au vert grisâtre du reste,
Aux pieds nus sous un flamboyant rouge tu reluis !
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de couleur
Maloya, ma lo ya, ma lo ya de la nuit"
En chantant sur un air de terre natale, l’Afrique. Le son des instruments laisse l’envie de danser, de se sauver, devenir un "marron" océanique. Et enfin la joie de vivre la vie en rose…
Puis le claquement des mains sur un instrument entraîna vite le hanchement d’une esclave. Ensuite deux hommes se donnaient aux déhanchements. Le son du tam-tam continuait d’un air sauvage sur des sonorités venant bien du village de Maloya. J’avais pensé qu’ils étaient fous ou endiablés. Leurs corps semblaient, sous ce sillage, apparaître des guerriers africains du Bakou. Telle fut ainsi un rythme d’une danse traditionnelle sur des tam-tams luisants à la lumière du feu. Cette danseuse me surprenait. C’était-elle, qui se livrait aux envoûtement à un dieu. Lui offrant sa joie, son honneur et sa danse. Afin que le divin puisait l’évocation d’un retour en Afrique, notre terre d’enfance. Le son d’un tambour venait par l’application des mains sur un rond recouvert de peau de chèvre. Ce qui donna un rythme magique à la nuit. Cette mélodie faisait monter la fièvre aux corps des danseurs d’un rythme tout épanoui. Un chant de guerrier s’éleva alors, et les hommes se bagarrèrent fort heureusement, ce duel n’était qu’un jeu d’adresse. Jamais ces hommes se battaient réellement, tout était gestuel. Je n’avais pas connaissance de leurs gestes. Job me disait cette danse vient de Maloya. Les instruments sont des "jumbés" et le reste des "roulèr" des "cayamb" tous ces sons de la-bas que nous avions reconstitués ici dans l’île. Le blanc vêtu par la danseuse espérait la paix donnée par cette liberté d’île.
Ici on pouvait chanter les nuits un son gai. Deux jumbés vibraient en rythme sur des flammes aux corps à moitié nus. Seul un bout de tissu couvrait les parties du sexe par une pagne blanche. Aussi le feu réchauffait leurs dermes nus. La sonorité m’emportait dans mes songes. Je voyais au village par lequel des danseurs enflammés dansaient les pieds nus et sans ronge sur la braise s’embrasant de sa chaleur.
Ils ressentaient de la joie sur leur visage et dans leur cri une mélodie pour nos dieux. Ce soir ce chant me rappelait l’Afrique sage. Cette image me présage l’espoir par dieu :
" Chante mon espoirà dieu sur cette flamme.
Ô feu brûlant avec nous flammes du passé.
Sur ma peau chauffée par un dur soleil, l’âme
chante dans le noir mon espoir tant harassé.
Qu’importe étranger, ennemis tout peuple
ne baissons jamais nos yeux sur notre espoir.
Chante dans le noir de toutes nos forces, peuple
africain soyons si fier d’être nés le teint noir.
Nous devons tenir l’épreuve, que notre vie
pour notre dieu du feu, soit louange ce soir.
Chante noir d’Afrique et d’ailleurs pour notre survie.
Chante et ne baissons jamais nos yeux pleins d’espoirs.
Ces fers que nous avons aux pieds, aux bras, aux chaînes
qui nous marqueront dans nos vies de tous les jours.
Comment pourrons-nous enfin oublier nos haines ?
Si le temps nous libère nos souffrances pour toujours,
chantons, chantons mes frères noirs de toutes forces
car ce feu réchauffe nos espoirs voués à Dieu.
Seul un libérateur pourra venir en force
nous libérer de ces gens ainsi de ce lieu ".
J’eus cette joie d'entendre chanter ces prières. Depuis mon départ de l'Afrique, je n'avais l'occasion de les réentendre de manière si belles et si mélodieuses, qu'elles exprimaient. Quand elles sont chantées autour d’une flamme, c'est tant plus agréable, du baume au cœur. Je parlais à Dieu, demandant une arme pour mieux vaincre l'esclavage qui me fait peur. Cette nuit était la plus longue de ma vie et la plus angoissante. Je réalisais que nos prières étaient espoir, une envie de liberté, j'étais l'oiseau enivré mais sur cette liberté d'un soir j'étais en cage. Ne se doutant point de découvrir un ailleurs !
Hors ma cage, existait-t-il un présage ? Un monde ailleurs sans pièges, sans prédateurs. Le piège des hommes au-delà des cages à oiseaux, ignore que signifie le prix de la liberté. Ils ignorent les gages du mot bonheur, le préférant au mot mépris. Faut-il profiter des moments présents : boire, manger, chanter ainsi danser autour du feu, sans se demander la juste raison croire. Croire notre existence, au divin, Dieu. Mais croire à quelque chose pour atteindre mon but qu'est d'être libre de pouvoir voler comme un oiseau puis de pouvoir atteindre ma terre africaine et de survoler le ciel des nuits de songes nostalgiques. Un besoin mélancolique de voir les siens. Je rentrais dans ma cage abandonnique.
Puis nous avions dansé, chanté sur des poèmes de Job. Ce dernier m’avait tant impressionné par son éducation d’un monde d’extrême. Je lui posais la question :
― Où étiez-vous né ?
Job me répondit à Zanzibar d’Afrique.
― Depuis quand êtes-vous prisonnier de ce pays ?
Il me rappliqua :
― Bien trop longtemps, dix ans que je suis chez Ombline, c’est ma case aussi.
― Mais ces poésies viennent d’où, quel personne ? lui rétorquai-je drôlement pour m’informer.
Job me conta les soirées non "esclavonnes". Dans le salon de nos maîtres, été formé chaque soirée à un coin dit poétique. Dame, Sieur ainsi que nous les serviteurs ont les honneurs d’écouter de la musique. D’où, un soir, les poésies de Charles poète. Notre jeune Maître m’a appris à écrire et de même à lire pour faire les menus. Job me faisait l’éloge de Charles, dire même son grand avenir poète saugrenu ! Charles logeait à Saint-Gilles-les-hauts, demeure de ses parents Sieur Louis Leconte à "l’Olivier". Son père était chirurgien breton, leurre des armés napoléoniennes. Ce dernier se fixa à Saint-Paul, il épousa Dame Suzanne Lanux me disait-il souriant. Mon Sieur Louis est devenu planteur, Dame Suzanne est créole en me décriant. Le jeune Charles revenait de France dont il fit ses études au Collège Bourbon. Pendant la grande partie de nuit, l’enfance de Charles me fut conté par récitation. Cet aveu m’avait enrichi de culture. Immanquablement Job parlait mi-africain et mi-créole. C’est cette nuit si pure, réchauffée des dernières flammes du matin que naquît cette passion d’apprendre le créole.Je ne renie pas mon passé d’homme africain.
J’espère quitter cette île mais qui s’en étiole ? Ce n’est là qu’un rêve mais qui sait pour demain ? Job m’avait assuré d’apprendre le créole. Chaque soir nous apprendrons et jusqu’à l’unisson disait t-il, promettant jouer son rôle. Et ce qui nous permettra d’écrire des chansons. Job avait une passion pour la musique et il composait des textes en africain. Depuis qu’il savait bien lire des reliques il s’apprêta, alors, de bien écrire soudain. Il regarda de tous les cotés si personne nous voyait. Il prit un bois, traça par terre. J’ai vu des étranges dessins dont personne de notre tribu n’aurait guère pu le faire ! Job me traça un dessin signifiant la lettre "A" puis "B","C","D" et par suite l’alphabet. Il me traduisait, c’étaient mes premières lettres. Je répétais souvent "MA","BE" "CHE" et puis "DET". Me voyant épris, Job me chantait un poème qu’il avait appris avec Charles d’un enseignant de Saint-Denis Mon Sieur Héry, et qu’il aime. Voici la version en créole lui poétisant :
La Fourmi ensemb' li grélé
Au Bras-Sec, dans l'plis haut d'Brilé,
A proç fricé Ma-Véronique,
L'avait ein s'en mêler grélé
Qui çantait tout l'jour son misique ;
Li n'embarrass' pas lendimain.
Dans tout la saison l'hivernaze,
Son vivr' li trovait dans n'cimin.
A qu'faire va souer pour fait plantaze?
Mais v'là que li beau temps la fini,
Vivr' n'a point, la fraid y rentre,
Pauvr' grélé la rest' tout cami,
Comment qu'va manzer son plein ventre?
A forç vir' son mazination
Li dit : "Moi connaît quoiqu' moi faire!
" Mon voisin fourmi bon nation,
" Va prête à moi mon nécessaire."
Li court la cas' fourmi, li cogner rondement,
Tin' fourmi cri darrière la porte :
" Qui çà qui cogn' si hardiment?
" Quiq'çôs" pour vendre? Allons, apporte!"
Li grélé répond : "Moi l'a grand faim!"
La fourmi guett' à li par d'arrièr' son serrire.
Li dit : "Grélé, vous trop malin!
" Prends pas moi pour vout' couvertire,
" Qouq' vous y fait soir et matin?
" Dans'n l'eau vous mirer vout' figuire?"
Grélé r'vir' : "Tir pas vout' fiçant,
" Vous sait qu'moi content badinaze,
" Moi tait çanter continellement.
" Çà mêm' l'était tout' mon l'ouvraze."
En morgrognant, fourmi dit : "Vous calamaka
" Moi n'don'ra pas vous ein bicique ;
" Si vous tant content la misique,
" Vous pé bien danser la polka." »
Louis Héry, « La cigale et la fourmi »
Fable créole dédiée aux Dames de Bourbon 1828
Au Bras-sec dans les hauts du Brûlé,
à proximité du champs de Man-Véronique,
vivait un grillon sans pudeur
qui, toute la journée, chantait sa musique.
Il ne se souciait pas du lendemain.
Pendant tout l’été,
il trouvait de quoi manger sur le chemin.
Pourquoi se fatiguer à cultiver ?
Mais voilà que la belle saison se termine,
il n’y avait plus de vivres,
il commence à faire froid ;
le pauvre grillon est resté tout saisi,
comment va-t-il faire pour remplir la pense ?
A force de réfléchir,
il dit : « Je sais comment faire !
Ma voisine, la fourmi, a bon fond
elle va me prêter ce dont j’ai besoin. »
Il court chez la fourmi, cogne sans vergogne à sa porte.
« Qui cogne si hardiment ?
Avez-vous quelque chose à vendre ?
Allons, apportez !»
Le grillon lui répond :» j’ai grand faim ! »
La fourmi le regarde par le trou de la serrure.
Elle dit : « Grillon, vous êtes trop malin !
Ne me prenez pas pour votre refuge,
que faisiez-vous du soir au matin ?
Dans l’eau, miriez-vous votre visage ? »
Le grillon lui répond : »Ne vous moquez pas,
vous savez que j’aime m’amuser.
Chanter tout le temps,
c’était cela mon travail. »
En grommelant, la fourmi répond : »Vous, misérable,
je ne vous donnerai même pas une miette ;
si vous aimez tant la musique,
vous pouvez bien danser la polka. »
― La fourmi est travailleuse, elle anticipe
alors au moment du mauvais temps de l'hiver
la fourmi fait tous ses provisions, le principe
Zangiba, des paysans qui cultivent sa terre
et qu’ils savent tous les saisons de l’année.
Or le grillon est tout son contraire, sans pudeur,
insouciant, inerte, il chante toute la journée
sans se préoccuper du froid venu d’ailleurs.
Grillon vit dans un rêve et sans souci à se faire !
La réalité est tellement hors raisons.
Bien entendu ceci n’est qu’une morale, flaire
juste le sens de la vie, Zangiba, sa raison !
m’expliquait Job en faiseur de bonne morale.
―Précisément que la fourmi a raison,
puisque c’est elle qui a le fin mot de la morale.
Pour finir, si on fait la fête comme le grillon
quand vient le grand froid, c’est de mourir qu’on risque !
Car comme la fourmi, nous sommes guère prêteurs.
" La Fourmi n'est pas prêteuse
C'est là son moindre défaut "
― Job cela nous fait tous réfléchir sur la vie. Mon grand-père me racontait des contes pareils en Afrique il y a pas longtemps, j’ai une envie de prendre conscience de mon sort et d’un éveil d’apprendre ta langue de blanc et des poésies.
― Zangiba la poésie est là, dans ton cœur, me disait Job en me touchant la poitrine.Il me conseilla de dormir, quelle magie !
J’ai pu m’endormir en pensant à toutes ces choses : la musique, danse, morale et la liberté. Mes premiers songes : je chantais quelque chose comme des paroles de ce monde alerté…Puis apparaissait en contre jour un homme. Il est créole et il est notre délivreur, alors nous criâmes notre joie à cet homme. En tout cœur mais ce fut un échec, quel stupeur ? La trappe se referma vite sur les esclaves. Je me disais : qui sont ces gens, nous enfermant de telle sorte et pourquoi nous sommes en cave ? Le soleil entra de nouveau, dès l’ouverture de la trappe et aussitôt nos cris se firent entendre. Mais l’homme descendit par une fissure dans le ciel bleu accompagné de plusieurs autres. Ils enlevaient nos chaînes de nos bras mourants puis ils écartaient les pieds du piège d’un des nôtres. J’étais aveuglé par la lumière du levant. Je n’osais pas ouvrir mes paupières cette journée il y avait autant du soleil sur le pont. L’un d’eux voyant mon impossible avancée me traitait de sale nègre, paresseux et bon à rien, il est juste bon pour l’esclavage. Je ne comprenais pas plus la définition de ces mots soudain je tombai de mon nuage c’était la douleur des coups de fouets par pressions qui me sortirent hâtivement de mon rêve.
Le commandeur me réveilla à coup de fouets. Je sautai d’un bond reprenant ce jour sans trêve. Me voici devenu la bamboche aux fouets. Ceux qui riaient, sous le fouet, mordirent les lèvres. Toute la journée j’ai coupé la canne à sucre. Mes mains ne pouvaient plus couper tous ces roseaux. Ce matin Job n’était pas aux champs de sucre ! Il venait que pour nous remettre les couteaux. Il venait en fin de journée pour nous reprendre. La journée épuisait tous nos membres du corps. Nos ventres criaient famine il fallait attendre que le soleil se baisse pour avoir un réconfort. Une brise légère venait de ses caresses sur nos visages en sueur nous avertir d’un éventuel repos ; un besoin sans cesse. On nous apportait de l’eau ensuite, repartir pour un long moment de coupe aux champs de cannes. Femmes, enfants, vieillards ou bien jeunes comme moi nous étions les plus bêtes moins que leurs ânes. Les jeunes femmes coupaient paisiblement, pourquoi cet acharnement sur des êtres vulnérables ? J’étais si fatigué que je ne trouvais mots pour dire que la canne nous est pas si aimable ! Je regardais la femme dansant près nos hameaux et autour du feu, j’aurai aimé lui décrire dans un poème sous cette pluie de traits que le rayonnement de sa peau peut nuire à mon jeune regard lui traçant un portrait :
Pluie de traits
Une fine pluie de traits se laisse tomber par terre.
N’est pareille aux feuilles mortes à ses pieds mouillés.
Elle danse derrière les barreaux mais, en moins fière !
Portant un fer blanc autour du cou comme collier,
Telle esclave venant d’Afrique et qui porte ma vie !
Femme tu emportes aussi mon cœur par ta vision
Africaine ; à l’épouse de toutes les envies
Qu’un jeune regard recherche pour son éducation.
Ton corps épouse toutes les formes de ta danse,
Et montrant son torse nu à la pluie par faveur
Désireux tant bien de te voir libre, je pense
Qu’à nos lourds fardeaux d’esclaves qui nous font clameurs !
Elle laisse cette pluie de traits venir à la caresse
D’un vent très vicieux qui vient pour l’amadouer !
En soufflant sur elle, cette pluie d’été, ne cesse
De vouloir la persuader, sa liberté…
La journée semblait se fatiguer dans le calme. Nous avions eu l’honneur d’assister à un coucher d’un merveilleux soleil au loin pleine mer calme. Les rayons étaient si proches qu’ils me touchaient. La peau huilée sous sa braise de la journée. De même c’était si puissant pour mes pauvres yeux. J’attendais Job les yeux mi-clos en fin journée. Le vent soufflait de plus belle ô merci mon Dieu. Job arrivait avant la fin de la lumière sur la mer afin de nous prendre nos couteaux. Plus tard Dame nous donna une bonbonnière contenant de l’eau fraîche à boire comme cadeau. Quand vint la nuit, après avoir nourri les bêtes, autour du feu Job nous apporta à manger. Ce fut le moment préféré pour la fête. Job notre cuisinier nous avait mélangé du riz avec du grain rouge à la graisse. Il avait ajoutait des ailes de poulet. Le soir nous avions dansé sur une faiblesse du corps blessé mais un feu de joie nous aguets.
La ronde joie
Autour de cette flamme nous apprenons
Que le monde nous est devenu tendre.
La ronde de joie et d’amitié nous la dansons.
Feu qui réchauffe tant de gaieté à prendre.
Dans cette danse, nous nous prenons pour un dieu
Puisque une chance nous rayonne, les flammes.
Ces flammes ressemblent aux lumières du ciel bleu.
Ces étincelles réveillent prières pour l’âme.
Dans cette ronde nous apprenons à vivre
Dans un monde heureux, libre et donc en paix.
Cette nuit est une bamboula pour revivre
Chaque nuit que nous pourrons sur un air de paix.
Célébrons nos retrouvailles sur cette ronde de joie
Dansons chantons sur un air de maloya
La ronde de joie que Dieu nous a donnée en joie
Mettons nos maux, nos haines de côté tra la la...
Plus tard, Job m’assurait de la bonté d’Ombline, notre maîtresse du domaine qui porte Desbassayns. Job connaissait bien l’histoire de Dame Ombline. Nous nous mettions dans un coin pour fuir les malsains qui écouteront et argueront à Ombline. Et tandis que les autres esclaves chantaient Job me fit des confidences sur dame Ombline.
― Héritière fortunée, épousa en l'église de Saint-Paul, Mon Sieur Panon, dit Desbassayns. De vingt-trois ans son aîné, lui donnait en guise onze enfants dont Charles¹ et Joseph Desbassayns. Après la mort de son mari, Paulin, elle gère tout le patrimoine familial avec faveur. C’est une femme qui est faîte pour les affaires. Elle apprécie les esclaves qui sont travailleurs.
Avec une santé de fer, travailleuse son immense propriété et qui s'étend sur plusieurs centaines d'hectares. Merveilleuse femme et bien gentille à la fois d’autre prétend le contraire notamment à Saint-Gilles ainsi Bernica. Mais les esclaves sont offensant. Ils travaillent essentiellement dans l’île à la culture de la canne, construisant Bourbon. Il faut être fier de dame Ombline. Un jour, je lui demanderai de vous placer à Villèle avec moi pour m’aider en cuisine.
Mon ami Kalla venait à notre rencontre. Job ne parlait plus de Dame Ombline il se leva aussitôt pour prendre son bobre serrant contre lui comme un enfant contre sa mère puis chanta :
- Li cien ensemb' z'aigrett’
Li cien noir d'François Magallon
L'était invit' commér' z'aigrette
Pour vient manzer rougaill' civrette,
Kary brinzell' et brèd' cresson.
Li dit tout bas : (Guett' son mal faire!)
"Vous n'manz'ra pas tout mon commére" ;
Li grain manzer piti piti morceau.
Li fait soso di riz, soso clair comm' di l'eau.
Quand qu'manzer finit couit, z'aut' dé l'assis' à table,
Mais li tout sèl pour manzer l'est cacable,
Li baliait li plat rondement
Et man z'aigrett' y guett' sél'ment.
Son la bec l'est trop long', li piq' piq' comm' çà même,
Li pé pas manz' manzer l'est mou comment la crème,
Mais li fait pas semblant li dit :"Merci, z'ami,
"Vout' tour aussi mon cas' vous va vini",
"Quand qu'moi n'a r'joind' di monde honnête",
"Tout comment vous, moi coutim' rend' z'aut' fête".
"Moi n'en a cousin' Bras-Panon",
"Zédi va port' à moi la viande ensemb' graton"- "Va porte à vous la viande! soupelait, mon commère",
"Ci zour là nous va fair' bonn' cère". - "N'a point quéq'çôs' qui va fair' moi rester" ;
"Zédi matin vous pé compter". - Zédi matin li l'arrive avant l'hère.
Z'aigrett' visaz' çagrin l'a commence : "Ah! compère, - Vous là voudra bien séquiser,
- Çat la saut' sis la tabl' , tout' li plats l'a brisé.
- Moi l'était blizé mett' manzer dans n'gargoulette".
- (n'avait siprit commèr' z'aigrette!)
- "Allons-nous manz' touzours". Son grand la bec pointi
- Plonz', quand même li trou l'est piti,
- Li hall' hardiment bon bouçée,
- Et li cien tant sél'ment li sentir la fimée.
- Faut voir vilain grimaç qu'li fait,
- Quand qu'li souq' gargoulett' pour avis' li collet.
- Ein' fois qu'z'aigrette plein ventr', li dit : "Salam, compère",
- "Moi s'en va, moi n'en a z'affaire".
- Quand qu'z'aut' l'a séparé , n'a pas 'tait bons amis.
- Li cien, li ventr'plat, tout camis,
- La r'tourn' la cas' son maîtr' , son qué rentr' son patte.
- Vous donne à moi manioc, moi rendre à vous batate.
- Louis Héry, Le renard et la cigogne -1828.
- Le chien est avec z’aigrette
Le chien noir de François Magallon
était invité chez la commère ‘’z'aigrette’’
Pour manger un rougaille chevrette,
cary ‘’bringelle’’ et du ‘’brède’’ cresson.
Elle dit tout bas : (regardant son comportement!)
"Vous n’avalerez pas tous mes histoires ;
Il mangeait ainsi petit à petit .
Elle avait fait une soupe de riz, si claire qu’on aurai dit de l'eau.
Quand le repas fut cuit ils s’attablèrent
Mais il était le seul à manger, c’était gênant,
Il balaya d’un coup le plat
Tandis que z'aigrette l’observait.
Comme elle a un long bec, n'en put attraper miette,
Lui il pouvait autant manger c’était mou comme la crème,
Mais il ne faisait pas semblant et disait : « Merci mon ami »,
― Je vous inviterai un jour chez moi »
― Quand j’aurai affaire à des personnes honnêtes",
― Comment pouvez-vous dire ça, je suis respectueux des coutumes festives.
― J’ai un cousin à Bras-Panon,
Jeudi il me portera de la viande et du "graton"
― Il vous portera de la viande ! s’il-vous-plaît, "mon compère",
― Ce jour là nous ferons de la bonne chair
― Il n’y a pas quelque chose d’autre à faire, je préfère rester
― Jeudi matin, vous pouvez compter sur moi.
Jeudi matin, arriva (vite) avant l'heure.
- Le visage de Z'aigrette était chagriné : "Ah! compère,
Vous m’avez bien eu",
Sauta sur la table, et brisa tous les plats.
"Je suis obligé de manger dans un vase à long col".
(avait mal prit la commère z'aigrette !)
― Allons-nous continuer de manger. Son grand bec pointu
Plongeait, quand même, dans un trou étroit,
Elle avait du mal à bien avaler,
Et le chien attendait seulement de la sentir enfumée.
Fallait voir la grimace qu’il faisait.
Quand elle prendra le vase à long col, lui la prendra par le cou.
Une fois qu’elle avait le ventre plein elle dit : "Sa va compère",
― Je m’en vais j’ai beaucoup à faire.
Quand il se sont séparés ce n’était pas en bons amis.
Le chien, tout camus au ventre vide,
retourna chez lui près de son maître la queue entre les pattes.
Vous me donnez du manioc, je vous rends des patates. - Job me traduisait en africain le texte de Louis Héry, titre « Li cien ensemb' z'aigrett’ ».
Fin de l'épisode 2 (à suivre...)